Histoire du mot « patrimoine »
Le mot patrimoine existe depuis l’Antiquité mais il n’avait pas le même sens. Il faut attendre le XXe siècle pour que son sens actuel soit fixé.
Alors, comment désignait-on ce qu’il recouvre avant cette époque? En fait, la notion elle-même n’existait pas, elle était très incomplète par rapport à ce que nous connaissons aujourd’hui.
Comme le montre ce schéma, d’autres mots étaient utilisés avant le milieu du XXe siècle, mais il faut garder à l’esprit qu’ils ne désignaient pas tout à fait la même chose.
Voici un petit historique des usages du mot:
Antiquité: le mot « patrimoine » désigne les biens et possessions (pas nécessairement matériels) qu’un individu ou une famille a hérité de ses ancêtres.
Jusqu’au XVIIIe siècle: les possessions de l’Eglise sont considérées comme le « patrimoine de Dieu » et donc comme le « patrimoine des pauvres ».
4 octobre 1790: Puthod de Maison-Rouge présente une pétition devant l’Assemblée pour demander une sorte d’inventaire documenté des « Monuments précieux de notre histoire ». Pour la première fois l’expression « patrimoine national » est employé. Elle ne sera pas reprise immédiatement.
Du XIXe siècle à la première moitié du XXe: le mot au sens figuré qualifie tout ce qui est considéré comme le bien commun de l’humanité ou d’une nation spécifique (mais renvoie surtout aux idées et au savoir).
➔ Depuis la Révolution, le patrimoine est associé à l’idée de civilisation
1931: première conférence internationale des architectes et techniciens des monuments historiques, à Athènes, développe l’idée de patrimoine de l’humanité qu’il faudrait recenser et préserver.
➔ XXe siècle: le « patrimoine » désigne de plus en plus des objets matériels
1950: l’UNESCO parle de patrimoine en le qualifiant systématiquement de « culturel »
2003: l’UNESCO reconnait le « patrimoine culturel immatériel »
➔ Depuis le XXIe siècle, les créations immatérielles sont aussi prises en compte
Quelques usages antérieurs à notre notion contemporaine
Chateaubriand: les pensées du « génie de l’homme » sont un « patrimoine de l’univers »
Guizot: l’histoire n’est plus le patrimoine des érudits
Clémenceau: le « patrimoine d’idées » de la France doit être défendu (par la guerre notamment)
Romain Rolland: qualifie les œuvres des Hommes de « patrimoine du génie humain »
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Christian Hottin et Claudie Voisenat (éd.), Le tournant patrimonial: mutations contemporaines des métiers du patrimoine, Paris, France, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2016.